L’intelligence artificielle s’invite progressivement dans les pratiques d’Audirep, avec un objectif clair : gagner en efficacité tout en préservant l’expertise et la valeur ajoutée humaines. 46 cas d’application ont été identifiés ! Comment avons-nous choisi d’avancer ?
Laurence Hua, Directrice générale adjointe, et Mathieu Dac-Khé, Responsable informatique et digital, reviennent sur la démarche qu’ils ont choisie, les cas d’usage déjà déployés et les perspectives.
Pour quels usages l’IA est-elle adoptée aujourd’hui chez Audirep ?
Laurence Hua : Nous avons commencé par les usages qui concernent directement notre pratique métier au quotidien. C’est sur le volet qualitatif que nous avons trouvé le plus rapidement des outils utiles, notamment pour la retranscription d’entretiens ou de focus groups. L’IA ne remplace pas l’analyse fine réalisée par nos directeurs d’études, mais elle leur permet d’aller plus vite sur les étapes techniques pour se concentrer sur ce qui compte : la profondeur de l’interprétation et le conseil au client. Nous intégrons aussi des outils dans nos fonctions support, comme la communication.
Mathieu Dac-Khé : Côté quantitatif, nous avons intégré l’IA pour la codification des verbatims. Il s’agit d’une tâche chronophage, surtout quand le volume de réponses est important. Aujourd’hui, l’IA est capable de proposer un plan de code et de coder les verbatims avec un niveau de qualité satisfaisant. Cela reste contrôlé par les équipes, mais le temps gagné est là aussi significatif.
Vous êtes en train de développer un outil interne pour être plus efficace sur la création des questionnaires…
MDK : Oui, grâce à une base de données que nous avons construite en regroupant tous nos anciens questionnaires. À partir de cette base, nous avons choisi et paramétré un outil IA qui propose des formulations adaptées aux thématiques. C’est doublement utile : cela fait gagner du temps aux chargés d’études et cela enrichit la réflexion en proposant des idées auxquelles on n’aurait pas forcément pensé.
LH : Cet outil va être rapidement adopté car il ne se contente pas d’automatiser : il vient nourrir la créativité des équipes. L’IA ne remplace pas l’humain, mais elle constitue un levier pour explorer de nouvelles pistes.
Comment avez-vous structuré l’adoption en interne ?
LH : Nous avons fait le choix d’une démarche participative et progressive. Un Comité IA a été créé dès le lancement du projet. Il réunit chaque mois les managers pour suivre la veille, prioriser les projets et partager les résultats des tests. Ce comité n’est pas figé : à terme, nous souhaitons y associer des collaborateurs volontaires, en fonction de leur appétence pour ces sujets.
MDK : Mon rôle consiste à réaliser une veille technologique permanente : les outils évoluent très vite, et ce qui était prometteur il y a six mois peut être dépassé aujourd’hui. Chaque fois que nous identifions un outil intéressant, nous le testons en conditions réelles, nous l’adaptons à nos besoins, puis nous l’ouvrons progressivement avec des formations ciblées.
Avez-vous rencontré des réticences ?
LH : Comme partout, il y a eu des craintes : peur que la machine prenne la place de l’humain, peur que la valeur ajoutée de notre métier s’en trouve diminuée. En réalité, nous constatons plutôt l’inverse : l’IA va nous libérer de tâches répétitives pour nous permettre de passer plus de temps sur l’analyse stratégique, l’échange avec les clients et la production de livrables de qualité.
MDK : Il a fallu passer par une courbe d’apprentissage : au début, les résultats peuvent décevoir, si l’on ne sait pas encore bien paramétrer l’outil ou formuler les bons prompts. Mais une fois ce cap franchi, les gains sont réels et l’adoption devient naturelle.
Quelles précautions particulières avez-vous prises ?
MDK : La sécurité des données est un point non négociable ! Nous n’utilisons jamais de données clients dans des environnements ouverts, et nous sensibilisons régulièrement les équipes à la protection des informations. Nous avons aussi défini des recommandations précises : quel outil utiliser pour quel usage, comment paramétrer les accès, etc.
LH : Nous travaillons également sur une charte IA pour nos clients. L’objectif est de clarifier ce que nous faisons, pourquoi nous le faisons et avec quelles garanties. C’est une exigence de transparence qui anticipe aussi les obligations à venir avec le règlement européen AI Act.
Quelles précautions particulières avez-vous prises ?
MDK : Nous travaillons déjà à des projets plus ambitieux, comme le développement d’une IA propriétaire pour sécuriser et personnaliser encore davantage nos usages, ou l’exploration des données synthétiques pour enrichir nos échantillons et améliorer certaines analyses.
LH : Nous réfléchissons aussi à de nouveaux formats pour nos livrables, comme des vidéos ou des podcasts générés avec l’aide de l’IA. L’objectif reste le même : avancer étape par étape, en accompagnant le changement et en gardant toujours l’humain au centre.
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